mercredi 15 mars 2023

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Fosbury Fields Forever.

Faisons un rêve, comme aurait dit Guitry, rêvons d'un film "anarchiste", au sens reclusien du mot (Elisée Reclus), capable de s'épanouir librement, totalement, sans contraintes extérieures — celles auxquelles on doit se soumettre, auprès de ceux qui ont le pouvoir (CNC, télévision, régions, etc.), pour qu'un film puisse voir le jour —, en interaction seulement avec son milieu, celui d'une petite équipe, s'affairant harmonieusement autour d'un projet commun.
Anarchiste? Et la révolution là-dedans? Bah non, sauf à considérer comme révolutionnaire le projet lui-même: l'histoire d'un type qui — à l'instar de Fosbury (décédé dimanche) qui, lui, a vraiment révolutionné son sport — franchirait les obstacles (ceux de l'amour en l'occurrence, on ne se refait pas) en leur tournant le dos.

Fosbury, les z'anars et le lézard.

Si Fosbury a bien créé le "Fosbury Flop" — comment peut-il en être autrement puisque la technique porte son nom —, il n'est pas, historiquement parlant, l'inventeur de ce type de saut, qui se déroule, faut-il le rappeler, sur le dos ou à l'envers, comme vous voudrez... un étudiant du Montana, un certain Bruce Quande, l'ayant expérimenté au début des années 60 lors de compétitions universitaires, atteignant même 2 mètres, sans aller plus haut ni plus loin, faute peut-être d'une technique suffisante, faute surtout d'avoir pu bénéficier, pour la réception des sauts, de matelas en mousse, devant se contenter le plus souvent d'une fosse garnie de sable, avec le risque que cela comportait au niveau cervical; risque que Fosbury connut lui aussi mais de moins en moins, la mousse se généralisant, ce qui lui a permis de perfectionner sa technique et ainsi de progresser.
Exit Quande qu'on qualifiera quand même de pionnier, ce qui ne fait pas pour autant de Fosbury l'inventeur, car en la matière, celle du saut en hauteur, il s'agit plus d'innovation. Sauf qu'ici, dans le cas du Fosbury Flop, ce fut une véritable révolution. Déjà parce qu'il est apparu brutalement, aux yeux du monde entier, lors des Jeux Olympiques de Mexico (1968), sous les traits d'un grand échalas de 21 ans, faisant taire progressivement les "olé" rigolards, qui accompagnaient ses premiers sauts, pour les remplacer par des "oh!" d'admiration, jusqu'à sa victoire finale, record olympique à la clé (2m24)... Une révolution, donc, dans la mesure où cette nouvelle technique, inconnue jusque-là pour le plus grand nombre, passait d'un seul coup de l'ombre à la lumière, mais surtout parce qu'elle allait enterrer, en quelques années et pour toujours, l'ancienne technique. Pour une raison toute simple: elle permet de sauter plus haut. Et cela pour différentes raisons dont les principales sont la vitesse plus grande qu'elle permet d'acquérir à l'impulsion, lorsqu'on arrive devant la barre, et le fait que le mouvement est finalement plus simple dans son exécution qu'avec le rouleau ventral, d'où une progression rapide, voire spectaculaire, pour qui maîtrise la technique — Fosbury est ainsi passé en l'espace d'un an de 2m08 à 2m24; mais il n'y a pas que la technique, Fosbury avait aussi un mental de champion qui à Mexico lui a permis de franchir 2m24 à son troisième et dernier essai.
Bref, une révolution. Et à ce titre, c'est Dick Fosbury, devenu légende, qui l'incarne. Alors que parallèlement, c'est-à-dire au même moment où Fosbury se perfectionnait, dans les années 1965-66, une jeune Canadienne, du nom de Debbie Brill, recourait à la même technique (baptisée "Brill Bend" = la courbure de Brill), sans en tirer la même gloire, signe, c'est possible, de ce qu'on appelle "l'effet Matilda" (minimisation de la contribution des femmes à une découverte ou une invention), mais surtout parce que justement la gloire, du moins olympique, elle ne la connaîtra pas, et que les titres, moins importants qu'elle obtiendra, ne viendront que plus tard, dans les années 70, à une époque où le Fosbury Flop avait déjà envahi les sautoirs.

Les anarchistes.

Les anarchistes professent en s’appuyant sur l’observation, que l’Etat et tout ce qui s’y rattache n’est pas une pure entité ou bien quelque formule philosophique, mais un ensemble d’individus placés dans un milieu spécial et en subissant l’influence. Ceux-ci élevés en dignité, en pouvoir, en traitement au-dessus de leurs concitoyens, sont par cela même forcés, pour ainsi dire, de se croire supérieurs aux gens du commun, et cependant les tentations de toute sorte qui les assiègent les font choir presque fatalement au-dessous du niveau général. C’est là ce que nous répétons sans cesse à nos frères, — parfois des frères ennemis — les socialistes d’Etat: "Prenez garde à vos chefs et mandataires! Comme vous, certainement, ils sont animés des plus pures intentions; ils veulent ardemment la suppression de la propriété privée et de l’Etat tyrannique; mais les relations, les conditions nouvelles les modifient peu à peu; leur morale change avec leurs intérêts, et, se croyant toujours fidèles à la cause de leurs mandants, ils deviennent forcément infidèles. Eux aussi, détenteurs du pouvoir, devront se servir des instruments du pouvoir: armée, moralistes, magistrats, policiers et mouchards." [...]
Ainsi les anarchistes ont à cet égard les principes les plus arrêtés: d’après eux, la conquête du pouvoir ne peut servir qu’à en prolonger la durée avec celle de l’esclavage correspondant. Ce n’est donc pas sans raison que le nom d’"anarchistes" qui, après tout, n’a qu’une signification négative, reste celui par lequel nous sommes universellement désignés. On pourrait nous dire "libertaires", ainsi que plusieurs d’entre nous se qualifient volontiers, ou bien "harmonistes" à cause de l’accord libre des vouloirs qui, d’après nous, constituera la société future; mais ces appellations ne nous différencient pas assez des socialistes. C’est bien la lutte contre tout pouvoir officiel qui nous distingue essentiellement; chaque individualité nous paraît être le centre de l’univers, et chacune a les mêmes droits à son développement intégral, sans intervention d’un pouvoir qui la dirige, la morigène ou la châtie. (Elisée Reclus, L’anarchie, 1894)

BonusLes Anarchistes, Léo Ferré, 1969.

Le Lézard. (extrait)

Lorsque le mur de la préhistoire se lézarde, ce mur de fond de jardin (c'est le jardin des générations présentes, celui du père et du fils), — il en sort un petit animal formidablement dessiné, comme un dragon chinois, brusque mais inoffensif chacun le sait et ça le rend bien sympathique. Un chef-d'œuvre de la bijouterie préhistorique, d'un métal entre le bronze vert et le vif-argent, dont le ventre seul est fluide, se renfle comme la goutte de mercure. Chic! Un reptile à pattes! Est-ce un progrès ou une dégénérescence? Personne, petit sot, n'en sait rien. Petit saurien. (Francis Ponge, 1962)

[ajout du 16-03-22]

Après la fête.

Comme il se fait tard, un drôle de fêtard, il faut se coucher: "fausse-coucher!", autrement dit arrêter, quitter la salle, bientôt défaite, mettre un terme à la fête, avant qu'il ne soit trop tard, trop tard pour se coucher, obligé de rester debout, pour continuer la fête — toute la nuit. Alors se coucher, de son long tout entier, prêt à rêver, comme d'autres à porter, porté qu'on serait par les rêves, bah tiens les voilà, qui doucement vous soulèvent, toujours allongé, c'est doux (rêvais-je de Léa?), mais qui subitement vous redressent, couvert de sueur, le cou vert de sueur — c'était un cauchemar. Alors respirer, lentement, le plus lentement possible, puis se recoucher, de nouveau allongé, pas tout à fait séché, les yeux fermés, attendant que le sommeil revienne, à défaut des rêves, mais c'est long, trop long, et c'est la sonnerie du réveil qui, au petit jour, met fin à l'insomnie.

Golden Eighties.

Mes 10 albums des années 80: (par ordre alphabétique)

The Colour of Spring, Talk Talk, EMI, 1986
The Correct Use of Soap, Magazine, Virgin, 1980
Crazy Rhythms, The Feelies, Stiff, 1980
The Nightfly, Donald Fagen, Warner Bros., 1982
On Fire, Galaxie 500, Rough Trade, 1989
Pacific Street, The Pale Fountains, Virgin, 1984
Seventeen Seconds, The Cure, Fiction, 1980
Spirit of Eden, Talk Talk, EMI, 1988
Steve McQueen, Prefab Sprout, Kitchenware/CBS, 1985
Swoon, Prefab Sprout, Kitchenware, 1984

4 commentaires:

  1. Bonjour, assez étonné de ne pas retrouver ici le Snowball (1989) de The Field Mice.

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    1. Non... mais dans les trente de 90's il y a For Keeps :)

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  2. Pas tout à fait aussi bon que Snowball, mais il faut bien choisir quand on fait un top.

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    1. Surtout que la liste 80's ne comporte que dix titres... disons que Snowball est peut-être plus homogène... ça me fait penser que sur l'ancien blog j'avais publié un best of des Field Mice, il faudrait que je le retrouve

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